Au royaume des aveugles, le pirate borgne est roi

En réponse aux cris de désespoir d'une l'industrie du disque moribonde, des campagnes répressives sont partout lancées contre ces dangereux flibustiers qui pillent sans remords les trésors mis à portée de curseur...
En gros, on expose la Joconde dans mon salon pour le bien être de la mondialisation mais si j'y jette un coup d'œil on le fait gicler de son orbite...

Ces mesures précisent qu'outre s'exposer à des amendes salées, l'utilisateur frauduleux peut se voir privé de connexion par les fournisseurs d'accès, ceux-là même qui te vantent les mérites de leur ultra haut débit. A quoi sert-il si ce n'est à télécharger? C'est la même hypocrisie qui conduit à réprimer la vitesse sur les routes et permet le commerce de bolides supersoniques! De même, 90% des CD-R fabriqués sont vendus à des fins informatiques... On devrait les acheter sans pouvoir en faire usage?
Comment mieux tenir un peuple que par les crimes auxquels on l'incite? Il suffirait de rayer de la toile ces sites qui invitent au téléchargement pour préserver quiconque de la tentation... Mais comment justifier la surveillance généralisée du net?

Et si les vrais pirates étaient ailleurs... Par exemple dans ces maisons de disque qui prennent les artistes pour des vaches à lait, qui prennent leurs auditeurs pour des cochons payants tant qu'ils se laissent manipuler mais pour des mangeurs de bétail dès qu'ils sortent des sentiers balisés.
C'est le comble de voir grimacer le marché devant le monstre qu'il a lui-même crée en l'inoculant par le biberon du gène de la surconsommation... A force d'artistes kleenex sans substances et d'albums bidons sur la vague de singles formatés à souhaits, ce consommateur fou finit par considérer les musiciens qu'il écoute comme les chips qu'il engouffre par poignée pleine. Qui sert de la merde en boite peut s'asseoir sur son pourboire! C'est la dure loi du commerce! Que la crise du disque touche au portefeuille des chieurs de sons avides, je m'en tamponne les amygdales! Je m'en barbouille le pourtour annal! Si ça peut les renvoyer à d'autres occupations, la musique en sort grandie.

Soucieuses de préserver le peuple d'une émotivité libre, d'une spiritualité pourvoyeuse de souffrance, les hautes sphères de la pensée unique ont cru tuer l'art en organisant sa gratuité mais c'est son souffle originel qu'on lui rend sans le vouloir! Le mélomane peut dormir sur ces deux oreilles... Les auteurs et compositeurs passionnés continueront d'exercer tant que leurs estomacs seront pleins! Ils miseront sur les concerts! Et c'est tant mieux! Démasqués les imposteurs!

Considérons le téléchargement comme la meilleure promotion qui soit, comme la clé d'une porte fermée à double tour pour les artistes en quarantaine au motif d'une singularité affirmée ou de lyrics trop conscients.
Mais, bien sûr, les majors médiatisent leurs excréments sonores à outrance et sont donc les seuls à ne pas tirer profit du téléchargement... C'est là où le bât blesse!